Danser sur un pied d’égalité

Texte d'accompagnement

Texte par Caroline Monnet

Selon la tradition Anishinaabe, l’univers a été créé sur le dos d’une tortue. C’est elle qui soutient le monde et incarne l’identité, la culture, l’autonomie et un profond respect pour l’environnement naturel. C’est le centre de toute création et solidifie notre relation particulière avec la Terre et tous les êtres vivants qu’elle abrite. Malheureusement, aujourd’hui à l’échelle planétaire, nos fréquences de vibrations se sont déconnectées et notre gratitude envers le monde naturel et animal s’est effritée.

La démarche audacieuse et généreuse derrière le projet SVP nourrir les animaux se place humblement en intermédiaire vers une réconciliation entre le monde animal et humain. Si vous avez déjà été en présence de l’artiste multidisciplinaire et commissaire indépendant en art contemporain Stefan St-Laurent, vous connaissez sans doute son grand attachement pour toutes les formes de vies et son amour pour les choses qui l’entourent. Sa personnalité rassembleuse et empathique, consciente du bien être des autres, vous met systématiquement à l’aise. À travers son regard, la différence n’existe pas. Les catégories sont écartées et toutes les formes de vie dansent sur un pied d’égalité. L’artiste invite à redonner au suivant, peu importe sa forme, son statut ou son espèce, à nous mobiliser pour s’élever collectivement.

C’est sous forme d’actes performatifs que St-Laurent offre son corps physique et métaphorique aux animaux. Il se dénude de tout égo pour atteindre une forme de pureté et d’abandon total qui lui permet, grâce à sa sensibilité et son intuition aiguë, à entrer en communion véritable avec le monde animal. Cet acte symbolique, amené tel un rituel sacré, laisse entrevoir une lueur de rédemption pour l’espèce humaine.

Par sa compréhension du cycle de la vie et de l’interconnexion entre toutes les espèces vivantes, l’artiste repousse la suprématie humaine sur le reste de l’état naturel et rejette par le fait même l’héritage occidental d’exploitation des ressources sous un régime capitaliste. On discerne une quête pour l’égalité au sens large, incluant la défense des droits des femmes ou des personnes racisées. Tout est inter relié et St-Laurent rend ainsi comparables toutes les formes de violences.

Ces manifestations artistiques prennent d’autant plus de signification à l’heure actuelle où la proximité avec le monde animal n’a jamais été aussi tangible. Les conflits entre les animaux et les humains s’aggravent partout sur la planète et nous devons faire usage de notre intellect pour trouver les moyens de les résoudre. Nous devons nous tenir responsables de la façon dont nous traitons les autres êtres vivants avec qui nous partageons la planète et comprendre que la survie des prochaines générations dépend de notre clairvoyance quant à la durabilité de nos habitudes de consommation.

St-Laurent pose la question fondamentale : Est-ce possible d’intervenir d’une façon éthique dans le monde animal et naturel sans rien prendre en retour ? Pouvons-nous faire mieux ? Pouvons-nous le faire différemment ?